FLORENCE JAUNEZ
POÈMES CHOISIS (PLUS BAS)
Amour
Amour
Mot détour
Pour dire nous
Ou vous seul.
Parole belle
Souffle doux
Souffle au cœur
Souffle au cou
Amour roux.
D’un désir fou,
Souple loup
Ou louve louent
L’air modèle.
Au bazar des beaux jours
Au bazar des beaux jours
Y’a comme un abat-jour
Une peau de tambour
D’un air lourd, lourd
Joue, couche en joue
Avec dents de loup
Ce déserteur, l’amour
Sans prévenir, pour rire
Ca vous déchire
Au bazar des beaux jours
C’est pour toujours
Et moins cher qu’ailleurs
La promesse du bonheur
Pour tout à l’heure
Un gâteau à la fleur
Qu’on nomme crève-coeur
Au vide de l’âme
Au vide de l’âme
Un pâle soleil brille
Juste au cœur des cris
Tu guettes, mon corps,
Rien qu’un retour
D’amour vif et doux.
Triste désir obscur
Et crainte des heures
Je ne sais … ce malaise
Traîne mes yeux perdus
Lancinante attente
Lancinante attente
Si lasse d’un cœur vide
Si lasse des rancœurs
Qui s’engouffrent et pleurent.
J’entends ton sourire
Me dire tes mains douces
Dans l’épais lointain
Des mots qui s’étouffent
Et nos lèvres soufflent
De ces lourds soupirs
Au goût de larmes
Mais nos rêves s’unissent
Et mes yeux caressent
Ta bouche et ta joue
Ton cou doux et notre amour.
Le matin ivre
Mois de givre
Le soleil me vise
Et blanchit l’air.
Entre les arbres
S’étale l’opale
Suranné des nuances oubliées.
La malle des voyageurs
Flotte en rêve
Vers les mers australes …
S’agit-il, fraîcheur,
Des soucis orange
D’étés lointains ?
Le simple parfum
Des fleurs de serre
S’étire, bonheur
Amoureux d’hiver…
Douceur, douceur,
Aux bras chéris
Je meurs blottie,
Sans impatience,
Et le flot des jours
Nappe, voile, drape
Tes caresses …
Sans cesse, ne cesse,
Le givre grise
Le matin ivre…
La doctrine
La doctrine de l’auteur
N’est pas requise
Il faut et il suffit
D’une étude précise
Pensée exquise
Goûtée
Remâchée
Inspirée, insufflée,
Assise, NON !
Seule la pensée
Aux îles lovée
Flotte et navigue
Perle indécise
Sans lignes ni épines
Pure marine
Mémoire
Au Guildo seigneur,
Chef de guerre,
Essaim Germain,
Roc et chaînes
Bleues de sel,
Filière !
Mer, baie et falaise,
À l’origine de haute lutte
Sous La Tour
Au secret
Cœur plié menu
ou
Joie larguée
Vague souple
Et bruissante
D’éclats frais !
Printemps
Combien de jours … ?
Temps indéfini
Le ciel s’arrête.
L’eau se tait.
Puis la nuit rit,
La source tarie
Encore jaillit !
Combien de fleurs… ?
Des nuées, des brassées !
De toutes couleurs,
De tous parfums !
Puis les bras en croix
Dans l’esprit du Tau
À terre m’envole
Vers l’espace haut…
Vol, immuable bonheur,
Ce printemps, de vivre.
J’entends les signes
Des Livres d’heures
Et les langages vivants…
Sécheresse
« Ce soleil n’a pas de nom »
Criaient les pétales morts
Les marrons noirs et ronds,
À bas le traître des saisons
Grognaient les feuilles froissées !
Il se joue de nous
Miaulait l’herbe sèche,
« Ma tête », criait à plein corps
La terre trop douloureuse.
Oui, ses yeux crèvent, éblouis,
Oui, sa peau craquelée cuit,
Oui, hélas ! Malheur ! Les rides
D’un rire amer la lacèrent.
Le monde pleure de rage
Et l’on craint l’épidémie
Et même la grève ne sert
Sans fin, sans fin, le vide
Dénude et viole l’univers.
« Ce soleil n’a pas de nom »
Chantaient des voix creuses …
Si légère au vent
Si légère au vent, cette goutte limpide
Poursuivant sa transparence
Étincelle, cristalline,
S’étend,
Danse
Et s’élance,
Éclipse de la raison,
Elle n’attend des eaux
Aucune aube.
Sons
Sons inaltérables. Purs et lourds. Sons !
Oiseaux solitaires. Sons : oiseaux nus.
Rumeur noire : le soir. Vie de cris ou nuit.
Sons jaillis. Enfuis.
QUI ?
OUI.
Vol fripé d’ailes veloutées.
Sons immuables. Semblant silence : ce jour.
Leurre. ET les pleurs des heures ?
Goutte à goutte.
Au clocher du temps.
Vapeur ou graine. Bec croisé. Une pépite d’or tinte.
Son sucré du cèdre.
SON.SON.SON.
Entends. Fou silence.
Multiple et UN. Inouï. Dit.
Attentivement
Attentivement
Les heures perdues
Comptent sur le boulier
Les points gagnés.
Une, deux, jamais
Plus à la fois,
C’est notre loi.
Nous avons notre temps…
Oui, mes sœurs
D’instants envolés.
Vous avez mal au cœur
Des minutes échappées ?
Voyons, songez au présent.
Pas d’avenir, pas de passé
Simples demies d’heures
Unies fil à fil
Cousues main au cadran
Par les impatients…
Mer de Chine
Mer de Chine qui me fascine
Mer aux vagues plates et vives
Chinée d’étoiles de nuit
Et de plancton lumineux aux rives
Mer de Chine, fleurs d’écume
Peintes d’algues vertes, brume
D’ombrelles, méduses et cœurs
Valseurs des lamparos tangueurs
Mer de Chine, dessin concentrique
Épure du cercle symbolique
Chaque été, chaque lune, cycle
Dessiné par chacune, unique
Mer de Chine, tortues centenaires
Qui s’en retournent vers le mystère
Visiteuses d’un soir, le rite accompli
Le lieu caché, les œufs enfin enfouis.
Mer de Chine, alors les pataudes
Plongent d’aisance, joyeuses du vent
Du vent blanc des mers sans cesse chaudes
Du vent du large, du vent d’Orient…